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Inès

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Ericka

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Kevin

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À 55 ans, Alain pense déjà à sa future retraite avec envie. « Il ne me reste que cinq ans à faire donc être frontalier, c’est une contrainte que j’accepte », confie-t-il. Une contrainte qui est également plus facile à digérer grâce au rythme de sa semaine. « On part quand même à 7h le matin, on rentre à 19h le soir, donc il n’y a plus de vie familiale pour toute la semaine. C’est pour ça que j’ai l’avantage de partir le vendredi et de revenir le lundi », sourit-il.

 

Le coordinateur informatique regarde les jeunes frontaliers d’un œil sceptique. « Je ne suis pas sûr que je serais venu travailler au Luxembourg pour toute ma carrière », analyse-t-il. Cela fait pourtant un an que le trajet en car vers le Luxembourg s’est imposé dans la routine quotidienne du Mosellan. « Pour l’instant, c’est intéressant, la semaine passe vite. »


 

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« Il ne me reste que cinq ans à faire donc être frontalier,

c’est une contrainte que j’accepte. »

Composition du marché du travail luxembourgeois

Des retards, le frontalier n’en a pas connu souvent. S’ils existent, c’est surtout lié aux intempéries. « Quand il y a eu des périodes de neige, je suis déjà arrivé à 10h au lieu de 8h20 habituellement », se souvient Alain. Une situation impensable pour le quinquagénaire, bien habitué aux flocons franc-comtois. « J’étais très surpris, ils avaient oublié de déneiger sur l’A31. » Il déplore un manque de moyens et d’équipements qui ont un impact sur la routine des automobilistes.

 

Par rapport à son précédent salaire, le quinquagénaire estime gagner entre 20 et 25% de plus chaque mois. « Habitant en Franche-Comté, la Suisse aurait peut-être été plus intéressante, estime Alain. Mais ce n’est pas l’Europe donc il y a d’autres contraintes. » Le Luxembourg n’est pas l’unique pourvoyeur d’emplois frontaliers en Europe, mais c’est celui dont le développement est le plus important. De 9% de travailleurs frontaliers en 1975, le marché du travail est passé à 44%.


 

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Microphone

Écouter les explications de Christian Ariès, président de l’agglomération de Longwy (PS), en cliquant sur le micro.

Après avoir surmonté les bouchons de l’A31, le car jaune sillonne entre les zones de travaux de Luxembourg-Ville pour accéder à la Cloche-d’Or. Les frontaliers sont bien réveillés, prêts à attraper leurs sacs et à filer vers la sortie. Alain, lui, prend son temps lorsque le bus marque l’arrêt, salue le chauffeur et se met en route vers son bureau. « Ici, le parking est un gros souci car sur les 100 personnes que nous sommes dans l’entreprise, il n’y a que 35 places, donc c’est le premier arrivé qui s’installe », analyse le frontalier. En effet, la journée de travail commence à peine, que les places ont déjà trouvé preneurs. C’est aussi pour cette raison que l’entreprise Ceratizit a fait le choix des navettes. Philippe Lanners, le directeur-gérant, ne fait payer à ses salariés qu’un abonnement d’un euro par jour. ll doit débourser 500 000 euros par an pour payer les prestataires de ce service. « Nous avons déjà agrandi plusieurs fois notre surface de parking, mais les terrains sont chers au Luxembourg, explique Albert Alvarez. Ce système a un coût qui évite la perte d’un espace qui ne rapporte rien à l’entreprise. » À Longwy, la gare qui achemine tous les jours des frontaliers vers Rodange puis Luxembourg manque elle aussi de places pour accueillir les voitures de ses usagers. Mais , Christian Ariès, le président de l’agglomération de Longwy (PS), a peut-être la solution. 


 

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8h20 : Arrivée à la Cloche d’Or

Guy Cambianica, adjoint au maire de Metz chargé des mobilités (PS), se veut optimiste quant à l’avenir : « Avec le tournant du numérique (télétravail, voitures autonomes…), la mobilité va devoir se repenser. Je suis optimiste sur l’intelligence collective qui devra trouver les bonnes solutions. Il va falloir encore faire tomber les frontières qui sont souvent dans les têtes et non dans les faits », note l’élu.

Pour Julien Gingembre, géographe à l’Université de Lorraine, cette solution seule ne suffirait pas à régler les problèmes de congestion. Contrairement à ce que défend la Dreal, le chercheur n’est pas partisan de l’ajout d’une troisième voie si le covoiturage ne se développe pas.

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Microphone

Écouter les explications de Denis Baur,
maire de Kanfen (DVD), en cliquant sur le micro.


Le passage de la frontière luxembourgeoise occasionne un bouchon quotidien de 30 minutes à cause du passage à 2x2 voies. Alain assure : « On s’y habitue vite. » Pour éviter cet embouteillage constant, des solutions innovantes sont imaginées, comme le Supraways. Il s’agirait d’un rail, suspendu dans les airs, auquel on accrocherait des wagons pouvant transporter les voyageurs vers le Luxembourg. Après l’abandon du projet Vital – un transport en commun tram-train qui devait relier par le rail le Nord Mosellan et le Luxembourg en longeant l’autoroute actuelle, les élus locaux se sont, en effet, tournés vers le Supraways. « L’objectif serait de transporter les gens à proximité de la frontière jusqu’aux principales gares », explique Maxime Meyer, responsable du projet d’étude en Lorraine Nord. « Le Supraways aurait l’avantage de proposer un système de parkings P+R près des habitations et servir un transport interne. L’utilisateur pourrait commander une cabine, d’une capacité de 9 places maximum, depuis son smartphone ou d’une borne. L’espace inter-véhiculaire serait entre 3 et 5 secondes avec un système 100% électrique. » Ce transport du futur n’a pour l’instant pas été mis en œuvre.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Aller s’installer au Grand-Duché pourrait être une solution envisageable pour Alain afin d’alléger son quotidien et son temps passé sur la route. Seulement, le frontalier est retenu en Moselle par sa situation familiale. « De toute façon, si j’habitais au Luxembourg, ce serait à cinq minutes du travail et juste histoire d’avoir une chambre pour dormir », avoue-t-il.

 

Selon Alain, les travailleurs frontaliers sont individualistes. Denis Baur, le maire de Kanfen (DVD), estime qu’il faudrait augmenter le nombre de personnes par voiture.

« Les bouchons, on sy habitue vite. »

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Cliquer pour écouter
la playlist d’Alain.

Playlist Alain

Même en se levant vers 6h, Alain n’échappe pas aux congestions. La vingtaine de frontaliers présents dans le car vaque à ses occupations pendant que le chauffeur s’enlise inexorablement dans le flux continu de voitures, camions et bus. Un joyeux bazar. Alain, lui aussi, a ses rituels de frontalier. Pour oublier les bouchons, il regarde un film ou écoute de la musique sur son téléphone. « Pour ma playlist, je mets Deezer. Je suis plus rock ou années 80 », confie le quinquagénaire.


Au loin, la frontière se dessine et le soleil pointe le bout de son nez. Des centaines de voitures serpentent jusqu’en haut de la côte. « La première fois que j’ai vu le bouchon, je n’y croyais pas. J’ai tout de suite pris une photo pour l’envoyer à mes proches », se souvient Alain. Pour éviter d’être coincés, certains frontaliers ont une astuce. Aurélien Thréhout est développeur web au Luxembourg depuis 4 ans. Quelques jours par semaine, il utilise sa moto. Habitant à Angevillers, il met 25 minutes de chez lui à son lieu de travail, au lieu du double en voiture et en car. « Ce moyen de transport me permet d’éviter les bouchons sur l’A31 », explique le frontalier. Sans sa moto, le passage de la voiture au car l’oblige à se garer au P+R.

7h30 : Ça coince sur l’A31

Pour Alain, le covoiturage ne semble pas une solution facile à mettre en place. Elle n’est pas encouragée par son entreprise qui a pris parti de plutôt participer au remboursement des frais de transport luxembourgeois. « Depuis le 1er janvier, ma carte luxembourgeoise de transport est payée à 100% donc j’ai juste le coût transfrontalier à ma charge », se réjouit Alain. Dans certaines entreprises, c’est l’employeur qui organise et prend à sa charge le transport des frontaliers. À l’instar de Ceratizit, fabricant de pièces en carbure, situé à Mamer. Depuis 2012, quatre lignes de bus – deux en France et deux en Belgique – ont été mises en place. Suggéré par les syndicats il y a dix ans, ce service est adapté aux salariés puisque les tracés ont été choisis après vote sur l’intranet et les horaires des sept navettes correspondent aux postes de bureau et tournants. « Sur nos 1250 salariés, 400 prennent le bus tous les jours », constate Albert Alvarez, délégué syndical OGBL à l’origine du projet. Une solution qui encombre moins la route et qui a tellement de succès auprès des salariés qu’une cinquième ligne est en projet.

Source : www.a31bis.fr

Source : Supraways

Projet A31Bis

Dans quelques années, le bus d’Alain pourrait bien emprunter une nouvelle route. Il s’agit de l’A31bis, qui contournerait Thionville par l’un des quatre tracés proposés par la Dreal. Une association s’est mobilisée contre le tracé F4 qui couperait la ville de Florange en deux.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PaiX à Florange se bat pour développer le covoiturage des travailleurs frontaliers et les transports en commun. Selon Nadine Manzin, la présidente, il faudrait beaucoup plus de parkings de covoiturage et de parkings autour des gares pour combler la demande des Mosellans et Meurthe-et-Mosellans qui vont travailler au Luxembourg. « Tout est déjà saturé à 6 heures du matin, or, des places, c’est ce que les frontaliers cherchent en premier », assure-t-elle. 

 

Cette nouvelle autoroute est en réalité un serpent de mer. Depuis les années 1990, l’idée du doublement de l’A31 fait débat. Le projet de l’A32 avait sérieusement été étudié à l’époque, mais il n’avait pas pu voir le jour à cause des divergences politiques. Comme le rappelle Éric Auburtin, professeur de géographie en classes préparatoires aux grandes écoles à Nancy : « L’État avait organisé un grand débat public pour donner la balle aux élus locaux. Mais ils ont longtemps eu du mal à échafauder des solutions et des positions communes. » Le nouveau projet présenté ces derniers mois est en tout cas loin de faire l’unanimité. À l’instar de Laurence Molé-Terver, qui travaillait au Luxembourg dans les années 1980. Elle propose une autre solution qui s’apparente à l’A32 :


 

Photo Droite
Photo Gauche

Sur son trajet, le car effectue plusieurs arrêts dans l’agglomération thionvilloise avant de s’engouffrer sur l’A31. L’un de ces arrêts est stratégique : celui du cinéma Kinépolis. Un énorme parking de covoiturage s’étend en face. Pour Étienne Hilt, adjoint au service transports de la Dreal Grand Est (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement), ces parkings ont vocation à se développer. Il explique que l’État va accompagner les collectivités locales pour qu’elles augmentent le nombre d’aires de covoiturage. « Plusieurs centaines de places devraient être créées avant la frontière pour limiter le nombre de voitures qui vont vers le Luxembourg, notamment aux échangeurs de l’A31 sur le secteur nord, à Thionville et à Kanfen », assure-t-il. Un second moyen de favoriser le covoiturage est en discussion au Parlement, dans le cadre de la loi des mobilités. Il s’agit de créer un cadre juridique permettant de réserver des voies pour le covoiturage : « On pourrait imaginer que, pour une autoroute de trois voies congestionnées, la troisième serait réservée au covoiturage. » L’installation de radars permet alors de contrôler le nombre de personnes présentes dans la voiture. « Cette voie pourrait de donner plus envie aux gens de s’y mettre, en particulier lorsqu’ils verront qu’ils se font doubler par des véhicules de covoitureurs », indique Étienne Hilt. Il rappelle également qu’actuellement, on compte en moyenne « 1,2 à 1,3 personnes par voiture ».

Aller travailler au Luxembourg est une solution qui s’est imposée à Alain pour se rapprocher de sa mère. Auparavant manager du système informatique de tout un site industriel en Franche-Comté, il est maintenant coordinateur informatique pour une branche d’ArcelorMittal au Grand-Duché. « Je m’occupe de tout ce qui est support informatique et aide à la personne », explique-t-il. Mosellan d’origine, il avait déjà quitté ses terres pour aller s’installer en Franche-Comté. « Retourner vivre ici ça a été un choix délibéré avec ma femme et mes enfants et c’est vrai que mes amis ont du mal à comprendre l’éloignement. Eux sont restés en Moselle, alors qu’on avait déjà fait le choix de partir il y a 30 ans », confie Alain. Installé à Bertrange, le frontalier a une routine bien imprimée et a choisi d’organiser sa semaine en trois grosses journées de travail, le mardi, mercredi et le jeudi, afin de pouvoir retourner passer du temps en famille le week-end. 

Famille Alain

« Jai déjà fait le choix de partir il y a 30 ans. »

« Le matin, on part à 7h05, on arrive à 8h20 quand tout se passe bien, quand ça se passe mal, c’est plutôt 9h15. » Les bouchons, les accidents, les retards, c’est le quotidien d’Alain Dupont depuis un an. À l’arrêt de bus de Thionville, il n’est pas le seul à attendre le car jaune qui vient le chercher. Comme lui, plusieurs frontaliers ont choisi cette solution moins onéreuse que le train, et moins contraignante que la voiture. « Le bus, c’est 35€ par mois, précise Alain. Le train est moins avantageux car il faut en changer pour aller jusqu’à mon travail, et c’est plus cher. » Deux bus se succèdent avant que le sien ne s’arrête : celui qui le déposera à la Cloche d’Or, à 50 mètres de son bureau. 

7h05 : Départ en bus de Thionville

Car Alain

Alain, entre deux terres

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PP Alain
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Patrick Luxembourger, maire de Terville (DVD), est aussi avocat au barreau du Luxembourg. Il connaît donc très bien le problème de mobilité auquel sont confrontés ses administrés. Il ne comprend pas pourquoi la seule solution proposée par l’État est l’A31bis : « Pourquoi, dans un monde qui change et avec ce qu’on nous annonce sur la voiture, s’obstiner à vouloir mettre en place à tout prix une solution qui était proposée il y a 20 ans ? Je veux qu’on me démontre que rien d’autre n’est possible.» Il poursuit : « Supraways n’est pas la question. Mais il n’y a jamais de discussion là-dessus. Ce sont des occasions manquées. »